Programme de rétablissement de la baleine noire du Pacifique Nord (Eubalaena japonica) dans les eaux canadiennes du Pacifique [finale] 2011

Baleine noire du Pacifique Nord

TABLE DES MATIÈRES

La série des programmes de rétablissement de la Loi sur les espèces en péril

Qu’est-ce que la Loi sur les espèces en péril (LEP)?

La LEP est une contribution majeure du gouvernement fédéral à l’effort national de protection de et conservation des espèces en péril au Canada. Cette loi entrée en vigueur en 2003 a notamment pour but de « permettre le rétablissement des espèces qui, par suite de l’activité humaine, sont devenues des espèces disparues du pays, en voie de disparition ou menacées ».

Qu’est-ce que le rétablissement?

Dans le contexte de la conservation des espèces en péril, le rétablissement est l’ensemble des mesures visant à arrêter ou à inverser le déclin d’une espèce en voie de disparition, menacée ou disparue du pays et à atténuer ou à supprimer les menaces pesant sur elle, de manière à améliorer ses chances de survie dans la nature. L’espèce est considérée comme rétablie lorsque son maintien à long terme dans la nature a été assuré.

Qu’est-ce qu’un programme de rétablissement?

Le programme de rétablissement d’une espèce est un document de planification énonçant ce qui doit être fait pour arrêter ou inverser son déclin. Il définit les buts et les objectifs du rétablissement et précise les grands types de mesures à prendre. La planification détaillée se fait à l’étape du plan d’action.

Dans le cadre de l’Accord pour la protection des espèces en péril, les provinces et territoires du Canada ainsi que les trois organismes fédéraux qui doivent appliquer la LEP (Environnement Canada, Agence Parcs Canada et Pêches et Océans Canada) se sont engagés à élaborer des programmes de rétablissement. Les articles 37 à 46 de la LEP (www.sararegistry.gc.ca/approach/act/default_f.cfm) énumèrent les éléments que doivent contenir les programmes de rétablissement publiés dans la présente série et définissent le processus d’élaboration de ces programmes.

Le programme de rétablissement doit être élaboré dans un délai d’un ou de deux ans après l’inscription de l’espèce à la liste des espèces sauvages en péril, selon la désignation qui lui est attribuée et la date de l’évaluation. Un délai de trois ou quatre ans est autorisé pour les espèces inscrites au moment de l’entrée en vigueur de la LEP.

Prochaines étapes

Dans la plupart des cas, on procédera à l’élaboration d’un ou de plusieurs plans d’action visant à préciser et à orienter la mise en œuvre du Programme de rétablissement. Cependant, les orientations fixées dans le programme de rétablissement sont suffisantes pour qu’on puisse commencer à obtenir la participation des collectivités, des conservationnistes ainsi que des utilisateurs des terres et des eaux aux activités de rétablissement. En outre, l’absence de certitude scientifique absolue ne saurait justifier le report de mesures efficientes visant à prévenir la disparition ou le déclin de l’espèce.

La série

La présente série réunit les programmes de rétablissement préparés ou adoptés par le gouvernement fédéral conformément à la LEP. La série s’accroîtra régulièrement avec l’inscription de nouvelles espèces et avec la mise à jour des programmes déjà publiés.

Pour en savoir plus

Pour de plus amples renseignements sur le LEP et sur les projets de rétablissement, consulter le Registre public de la LEP (www.registrelep.gc.ca).

Citation recommandée :

Pêches et Océans Canada. 2011. Programme de rétablissement de la baleine noire du Pacifique Nord (Eubalaena japonica) dans les eaux canadiennes du Pacifique [Finale]. Série de programmes de rétablissement de la Loi sur les espèces en péril. Pêches et Océans Canada, Ottawa. vii + 60 p.

Exemplaires supplémentaires :

Vous pouvez télécharger des exemplaires de la présente publication à partir du Registre public de la Loi sur les espèces en péril, à www.registrelep.gc.ca.

Illustration de la couverture : A. Denbigh, avec la permission de Pêches et Océans Canada.

Also available in English under the title :
Recovery Strategy for the North Pacific Right Whale (Eubalaena japonica) in Pacific Canadian Waters”.
© Sa Majesté la Reine du chef du Canada, représentée par le ministre des Pêches et Océans, 2011. Tous droits réservés.


ISBN 978-1-100-96053-1
No de catalogue En3-4/80-2011F-PDF

Le contenu du présent document (à l’exclusion des illustrations) peut être utilisé sans permission, à condition que la source soit adéquatement citée.

La baleine noire du Pacifique Nord est un mammifère marin qui relève de la compétence du gouvernement fédéral. Le ministre des Pêches et Océans est un « ministre compétent » en matière d’espèces aquatiques en vertu de la Loi sur les espèces en péril (LEP). Comme la baleine noire du Pacifique Nord pourrait être présente dans la Réserve d’aire marine nationale de conservation Gwaii Haanas, administrée par l’Agence Parcs Canada, le ministre de l’Environnement est également un « ministre compétent » pour cette espèce en vertu de la LEP. La Loi sur les espèces en péril (LEP, article 37) exige que les ministres compétents préparent un programme de rétablissement pour les espèces inscrites comme étant disparues du pays, en voie de disparition ou menacées, en collaboration et en consultation avec les parties intéressées ou touchées. La baleine noire du Pacifique Nord a été inscrite en tant qu’espèce en voie de disparition à l’annexe 1 de la LEP en 2006. La Région du Pacifique de Pêches et Océans Canada a dirigé l’élaboration du présent programme de rétablissement, en collaboration et en consultation avec l’Agence Parcs Canada et un bon nombre d’autres personnes et organismes (gouvernementaux ou non) (annexe III).

La réussite de la conservation de cette espèce dépendra de l’engagement et de la collaboration d’un grand nombre de parties qui participeront à la mise en œuvre des orientations formulées dans le présent programme de rétablissement et ne pourra reposer sur Pêches et Océans Canada, sur l’Agence Parcs Canada ou sur une autre instance seulement. Le présent programme conseille les autorités et les organismes qui peuvent participer ou qui souhaitent participer à des activités visant le rétablissement de cette espèce. Dans l’esprit de l’Accord national pour la protection des espèces en péril, le ministre des Pêches et des Océans et le ministre de l’Environnement invitent toutes les autorités responsables ainsi que tous les Canadiens à se joindre à Pêches et Océans Canada et à l’Agence Parcs Canada pour appuyer le présent programme et le mettre en œuvre au profit de la baleine noire du Pacifique Nord et de l’ensemble de la société canadienne. Pêches et Océans Canada et l’Agence Parcs Canada s’efforceront de soutenir, dans la mesure du possible, la mise en œuvre du présent programme, selon les ressources disponibles et compte tenu de leur responsabilité générale à l’égard de la conservation des espèces en péril.

Les buts, les objectifs et les approches de rétablissement présentés dans le présent programme sont fondés sur les meilleures connaissances actuelles et peuvent changer à la lumière de nouvelles observations. Les ministres compétents rendront compte des progrès réalisés d’ici cinq ans.

Un ou plusieurs plans d’action détaillant les mesures de rétablissement particulières à prendre pour appuyer la conservation de cette espèce viendront compléter le présent programme. Les ministres compétents mettront en œuvre des moyens pour s’assurer que, dans la mesure du possible, les Canadiens intéressés ou touchés par ces mesures seront consultés.

Pêches et Océans Canada
Agence Parcs Canada

Le présent document a été rédigé par Barbara Koot et l’équipe de rétablissement de la baleine noire du Pacifique Nord 2009-2010 (voir la section 4.2). Il est fondé sur l’ébauche du Programme national de rétablissement de la baleine noire du Pacifique Nord (Eubalaena japonica) dans les eaux canadiennes du Pacifique de 2004, qui a été rédigée par John Ford, Miriam O. ainsi que l’équipe de rétablissement de la baleine noire du Pacifique Nord 2004 (voir la section 4.1).

Pêches et Océans Canada (MPO) tient à remercier tous les membres de l’équipe de rétablissement de la baleine noire du Pacifique Nord de 2004 pour les efforts qu’ils ont consentis (voir la section 4.1) à la rédaction, avant l’entrée en vigueur de la LEP, de l’ébauche de Programme de rétablissement national de la baleine noire du Pacifique Nord (Eubalaena japonica) dans les eaux canadiennes du Pacifique, qui a servi de base pour l’élaboration du présent document. Le MPO tient également à remercier les membres de l’équipe de rétablissement de la baleine noire du Pacifique Nord de 2009-2010 (voir la section 4.2) qui ont révisé l’ébauche élaborée en 2003-2004 conformément aux exigences de la LEP en matière de contenu, qui l’ont mise à jour d’après de nouveaux renseignements et qui ont fourni de l’information, une expertise ainsi qu’un point de vue précieux.

Nous remercions également les membres du public, les scientifiques, les organisations non gouvernementales et les Premières nations qui ont émis des commentaires au cours du processus de consultation. Nous l’apprécions grandement (voir la section 4.2).

Conformément à la Directive du Cabinet sur l’évaluation environnementale des projets de politiques, de plans et de programmes, une évaluation environnementale stratégique (EES) doit être effectuée pour tous les documents de planification du rétablissement produits en vertu de la LEP. L’objet d’une EES est d’intégrer les considérations environnementales à l’élaboration des projets de politiques, de plans et de programmes publics afin de soutenir la prise de décisions éclairées sur le plan environnemental.

La planification du rétablissement profitera aux espèces en péril et à la biodiversité en général. Il est toutefois reconnu que des programmes peuvent produire, sans que cela soit voulu, des effets environnementaux négatifs qui dépassent les avantages prévus. Le processus de planification fondé sur des lignes directrices nationales tient directement compte de tous les effets environnementaux, notamment des incidences possibles sur les espèces ou les habitats non ciblés. Les résultats de l’EES sont intégrés directement dans le programme lui-même, mais sont également résumés ci-après.

Le présent programme de rétablissement sera manifestement bénéfique pour l’environnement en favorisant le rétablissement de la baleine noire du Pacifique Nord. La possibilité que le programme ait des effets négatifs non voulus sur d’autres espèces a été prise en considération. L’EES conclut que le présent plan profitera manifestement à l’environnement et qu’il n’entraînera aucun effet négatif important.

La LEP définit la résidence comme suit : « gîte – terrier, nid ou autre aire ou lieu semblable – occupé ou habituellement occupé par un ou plusieurs individus pendant tout ou partie de leur vie, notamment pendant la reproduction, l’élevage, les haltes migratoires, l’hivernage, l’alimentation ou l’hibernation » [LEP, paragr. 2(1)].

Les descriptions de résidence ou les raisons pour lesquelles le concept de résidence ne s’applique pas à une espèce donnée sont publiées dans le Registre public de la LEP, à : www.sararegistry.gc.ca/sar/recovery/residence_f.cfm.

Une ébauche du Programme national de rétablissement de la baleine noire du Pacifique Nord dans les eaux canadiennes du Pacifique a été élaborée en 2003-2004 par Pêches et Océans Canada, de concert avec d’autres intervenants et parties intéressées. Le présent programme de rétablissement répond aux exigences prescrites par la LEP et fournit de l’information à jour sur les baleines noires vivant dans les eaux canadiennes du Pacifique et dans les eaux adjacentes, tout en réorientant les mesures de rétablissement ciblant cette espèce.

La baleine noire du Pacifique Nord, Eubalaena japonica (Lacépède, 1818; Rosenbaum et al., 2000b), est un mysticète massif de grande taille qui présente les caractéristiques suivantes : corps trapu, couleur noire (avec quelquefois des taches blanches sur le ventre), absence de nageoire dorsale, lèvre inférieure fortement arquée et présence de callosités sur la tête (Kenney, 2002). La baleine noire du Pacifique Nord se nourrit presque exclusivement de copépodes qu’elle engouffre en filtrant l’eau à la surface ou en plongeant dans les eaux profondes.

Ce que nous savons de la répartition de la baleine noire du Pacifique Nord nous vient de données historiques sur la chasse à la baleine (1785-1913) et de rares observations faites depuis l’arrêt de la chasse. Selon l’analyse des données concernant cette chasse, la densité des baleines noires était élevée pendant l’été dans le golfe d’Alaska et le long de la côte est du Kamtchatkat, près des îles Kouriles, et vers le nord, dans la mer d’Okhotsk, de même que dans la mer du Japon, et était plus faible dans les régions du large (Josephson et al., 2008). On considère qu’il existe deux sous-populations de baleines noires du Pacifique Nord, une dans l’est et l’autre dans l’ouest, du moins pour ce qui a trait aux concentrations observées aux aires d’alimentation (Brownell et al., 2001). Les données historiques sur la chasse à la baleine indiquent que les baleines noires étaient présentes d’avril à octobre dans les eaux canadiennes du Pacifique (Townsend, 1935; Scarff, 1986; Brownell et al., 2001; Clapham et al., 2004). En raison de données insuffisantes, nous n’avons pu confirmer la répartition actuelle de cette espèce dans les eaux canadiennes du Pacifique. De 1900 à 1951, seulement sept baleines noires ont été capturées par les baleiniers de la C.-B., qui exerçaient surtout leurs activités dans les eaux côtières. La dernière observation de baleine noire dans les eaux canadiennes du Pacifique (cette observation pourrait avoir été faite en dehors des eaux canadiennes du Pacifique selon les coordonnées rapportées) aurait eu lieu en 1970 à bord d’un petit bateau éclaireur japonais, à l’ouest de Haida Gwaii et des îles de la Reine-Charlotte (Wada, 1975).

Les baleines noires du Pacifique Nord ont été exploitées de façon intensive de 1835 à 1900, jusqu’à ce que l’espèce se raréfie dans toute son aire de répartition et ne constitue plus une cible de prédilection pour les chasseurs commerciaux (Scarff, 1986; 2001). Malgré le peu d’information dont on dispose sur l’abondance des baleines noires du Pacifique Nord avant le début de la chasse, on estime que cette population comptait au moins 11 000 individus (NMFS, 1991), voire de 26 500 à 37 000 individus (Scarff, 2001). Même si les baleines noires ont été protégées dès 1935 par la Convention internationale pour la réglementation de la chasse à la baleine puis, en 1949, par la Commission baleinière internationale (Scarff, 1986; Donovan, 1992), les baleines noires du Pacifique Nord ont fait l’objet d’une chasse pratiquée illégalement par l’Union soviétique entre 1961 et 1979 (Brownell et al., 2001). Cette espèce a montré très peu de signes de rétablissement depuis la fin de la chasse commerciale, vraisemblablement à cause de la fin récente de la chasse illégale pratiquée par l’Union soviétique (Brownell et al.,2001; Clapham et Ivashchenk, 2009).

Actuellement, on sait très peu de choses sur l’abondance actuelle, les tendances relatives à la population, la répartition saisonnière ou les déplacements de la baleine noire du Pacifique Nord. Les estimations de l’effectif récent et les tendances qu’il affiche sont fondées sur des hypothèses, car elles s’appuient sur des profils généraux d’observation (p. ex. Berzin et Yabokov, 1978; Braham et Rice, 1984; Berzin et Vladimirov, 1989; Vladimirov, 1994; Vladimirov, 2000, cité dans Brownell et al., 2001). Cependant, on estime que la population vivant actuellement dans l’est du Pacifique Nord pourrait compter quelques dizaines d’individus (LeDuc et al., 2001; Clapham et al., 2005; NMFS, 2006). On estime que les premières estimations de l’abondance dans la mer de Béring et les îles Aléoutiennes combinées, qui se chiffrent à 31 et à 28 individus (respectivement d’après des données photographiques et des génotypes, au moyen d’une analyse par marquage et recapture), ne sont pas de beaucoup inférieures aux valeurs correspondant à l’abondance totale de l’espèce dans l’est du Pacifique Nord (Wade et al., 2010).

Par le passé, la chasse commerciale constituait la principale menace pour la baleine noire du Pacifique Nord, mais ce n’est plus le cas de nos jours. Le manque général d’information sur la présence de la baleine noire dans les eaux canadiennes du Pacifique nous empêche de définir avec précision les menaces qui pèsent sur l’espèce. D’après des données sur d’autres populations de baleines noires vivant ailleurs dans le monde et d’autres espèces de mysticètes, les menaces actuelles qui pourraient affecter la baleine noire du Pacifique Nord sont le trafic maritime et les collisions avec des navires, l’emmêlement dans des engins de pêche, le bruit et la pollution. Outre ces menaces, des facteurs limitatifs biologiques pourraient compliquer le rétablissement de l’espèce. Le principal facteur limitatif affectant la survie de la baleine noire du Pacifique Nord est probablement la petite taille de la population, qui peut occasionner une dépression de consanguinité et un effet d’Allee. Les autres facteurs limitatifs sont les caractéristiques du cycle biologique de l’espèce (maturité sexuelle tardive, longs cycles de reproduction et longue durée de vie), le changement climatique et l’effet de ce dernier sur les ressources alimentaires. Les lacunes dans les connaissances relevées concernent : la structure de la population et sa génétique; les paramètres du cycle biologique et la dynamique de la population; l’occurrence actuelle, l’abondance, la répartition, le comportement migratoire et l’utilisation de l’habitat dans les eaux canadiennes du Pacifique; les influences et les menaces d’origine anthropique; l’habitat essentiel.

D’autres recherches doivent être menées pour confirmer la présence de l’espèce dans les eaux canadiennes du Pacifique avant que des objectifs en matière de rétablissement, de population et de répartition puissent être clairement énoncés et examinés. Une fois que la présence de l’espèce sera confirmée, les objectifs restants porteront principalement sur la recherche afin de recueillir l’information de base concernant l’abondance, la répartition, l’habitat et les menaces. L’objectif à long terme du présent programme de rétablissement est d’augmenter les chances de survie et d’assurer la viabilité à long terme de la baleine noire du Pacifique Nord dans les eaux canadiennes du Pacifique. Pour atteindre les objectifs et combler les lacunes dans les connaissances qui s’y rapportent, on mènera des activités de recherche plurispécifique qui devraient profiter aux mysticètes et à d’autres espèces en péril. Il est important de souligner que, pour une espèce longévive comme la baleine noire, de nombreuses décennies peuvent être nécessaires avant qu’une croissance de la population soit perceptible, et encore plus avant que le rétablissement ne soit atteint. Il est, par conséquent, essentiel que la portée à long terme du présent programme de rétablissement soit reconnue dans l’évaluation des objectifs et dans les stratégies adoptées à l’appui de ce programme.

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