Description de la résidence du pipit de sprague (Anthus spragueii) au Canada, proposition -2005

L'article 33 de la Loi sur les espèces en péril (LEP) interdit d'endommager ou de détruire la résidence d’une espèce inscrite comme menacée, en voie de disparition ou disparue du pays. La LEP définit la résidence comme suit : « Gîte -- terrier, nid ou autre aire ou lieu semblable -- occupé ou habituellement occupé par un ou plusieurs individus pendant tout ou partie de leur vie, notamment pendant la reproduction, l'élevage, les haltes migratoires, l'hivernage, l'alimentation ou l'hibernation » [paragraphe 2(1)].

L'interdiction entre en vigueur dès l'inscription pour toutes les espèces menacées, en voie de disparition et disparues du pays se trouvant sur le territoire domanial et pour les espèces relevant de la compétence fédérale déjà en place se trouvant sur tout le territoire. Les espèces relevant de la compétence fédérale déjà en place sont des espèces aquatiques (une espèce sauvage de poissons, au sens de l'article 2 de la Loi sur les pêches, ou de plantes marines, au sens de l'article 47 de cette même loi) ou des oiseaux migrateurs protégés par la Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs (LCOM). La LEP renferme aussi une disposition interdisant la destructio n des résidences des espèces qui ne relèvent pas de la compétence fédérale et se trouvant sur les terres provinciales, territoriales et privées par décret du gouverneur en conseil si le ministre de l'Environnement le juge nécessaire [paragraphe 34(2), 35(2)].

Ce qui suit est une description de la résidence du Pipit de Sprague (Anthus spragueii), créée afin de rehausser la sensibilisation publique et aider à l'application de l'interdiction décrite ci-dessus. Comme oiseau migrateur protégé par la LCOM, le Pipit de Sprague relève de la compétence fédérale et donc l'interdiction portant sur la résidence est en vigueur sur tout le territoire où se trouve cette espèce. On sait que les Pipits de Sprague ont une résidence : le nid.

Nom commun -- Pipit de Sprague

Nom scientifique -- Anthus spragueii

Statut COSEPAC actuel et année de désignation -- Menacée (2000)

Présence au Canada– La présence du Pipit de Sprague au Canada est confinée en grande partie aux prairies et aux forêts-parcs à trembles dans les provinces des Prairies1. Au Canada, le Pipit de Sprague se reproduit principalement dans les prairies naturelles depuis les contreforts des Rocheuses dans le sud et le centre de l'Alberta2jusqu'au centre-ouest et sud-ouest du Manitoba3. Une seule observation de reproduction a été notée pour le centre-sud de la Colombie-Britannique 4 (figure 1).

Justification de la désignation--Perte continue de l’habitat de reproduction et population en déclin rapide dans l’ensemble de l’aire de répartition1.

Distribution actuelle connue du Pipit de Sprague (Anthus spragueii) au Canada.

Figure 1. Distribution actuelle connue du Pipit de Sprague (Anthus spragueii) au Canada.

Nids typique du Pipit de sprague

Les nids du Pipit de Sprague sont protégés comme résidence. Les Pipits de Sprague sont le plus répandus dans les prairies indigènes de hauteur et de densité moyenne, avec peu d'arbustes et des volumes modérés de végétation résiduelle et de déchet végétal1. Il est rare d’observer des Pipits sur des terres cultivées ou dans une région composée d’une couverture permanente et dense plantée pour la gestion de la sauvagine ou la conservation des sols1,5,6,7. De plus, il n'y a pas eu d’observation confirmée de la nidification dans ces habitats. Cependant, la présence de Pipits peut régulièrement être décelée dans des régions où les herbes indigènes ont été remplacées par des herbes de fourrage introduites (p. ex. dans les prairies de fauche et les pâturages ensemencés), si la composition de la végétation est semblable à celle de la prairie indigène8,9,10. L'habitat de reproduction devient inadéquat après le brûlage, lorsque l'activité du bétail est intense ou lorsque la gestion ou le manque de gestion produit une végétation haute et dense envahie par des arbustes et des plantes exotiques11,12,13,14. La longévité de l'impact variera selon l'humidité, le sol et la fréquence de la perturbation11,14. L'habitat indigène est aussi dégradé lorsqu'il est fragmenté par les activités des êtres humain15. Dans les pâturages indigènes, les nids sont situés dans des endroits où il y a des volumes accrus de végétation résiduelle et des herbes plus hautes (~ 20 cm de hauteur) 16,17. Les Pipits évitent de placer leurs nids dans les endroits qui viennent d'être broutés ou dans les endroits où une grande partie du terrain est sans végétation16.

Oeuf du Pipit de Sprague

Le nid est situé dans une dépression sous le niveau de la terre, surtout à la base de buttes d'herbes et est composé d'herbes grossières et fines tressées en coupe11. Les herbes longues croissant près du nid sont normalement tressées pour former un dôme18 (figure 2). Les pistes où l’espèce prend son envol sont souvent situées à l'entrée du nid et peuvent s’étendre sur 15 cm de longueur18. En moyenne, l'intérieur du nid est de 7,6 cm de diamètre et 3,8 cm de profondeur ; le trou d'entrée est de 5,1 cm19. Les femelles pondent de deux à six oeufs (normalement quatre ou cinq) et les incubent pendant 10 à 15 jours1,11,20,21. La teinte des oeufs varie de blanc- gris à beige pâle et ont des marques olive-brun à mauve-brun. Ils sont presque coniques à ovales et ont une taille d'environ 21 x 15 mm11(figure 3).

Les nids sont essentiels à l'abri, l'incubation et l'éclosion des oeufs et à l'élevage des jeunes.

Toute activité qui détruit la fonction du nid (c.-à-d. le site utilisé pour la ponte, l'incubation et l'élevage de la couvée) constituerait un dommage à la résidence ou la destruction de celle-ci. Cela comprendrait, mais sans s’y limiter, empêcher l'accès au nid, déplacer, faucher l’herbe ou détruire le nid ou encore enlever la végétation immédiatement adjacente au nid et au-dessus de celui-ci.

La construction du nid commence normalement au début ou à la mi- mai et les couvées se produisent généralement de la seconde semaine de mai jusqu'à la fin de juillet, mais peuvent se prolonger jusqu'en août11, 22. Les oisillons quittent le nid de 10 à 13 jours après leur éclosion11,20. Chaque nid est utilisé une seule fois et de nouveaux nids sont construits pour les tentatives subséquentes de nidification, généralement à une distance de 100 mètres du premier nid20,23. Le site du nid devrait constituer une résidence du moment de la construction du nid jusqu'à ce que toute la couvée quitte le nid (environ 30 jours).

Le Pipit de Sprague, ses nids et ses oeufs ont été protégés contre la chasse et la collecte en Amérique du Nord depuis 1916 par la Loi sur la convention concernant les oiseaux migrateurs du gouvernement fédéral. L'espèce est aussi protégée contre la perturbation sous le régime des lois provinciales en matière d’espèces sauvages en Colombie-Britannique24, en Alberta (inscrit comme un animal qui n'est pas un gibier)25, en Saskatchewan et au Manitoba1.

1 Prescott, D. R. C., et S. K. Davis. 1998. Rapport de situation sur le Pipit de Sprague, Anthus spragueii, au Canada, Comité sur la situation des espèces en péril au Canada.

2 Semenchuk , G. P. (éd.). 1992. The atlas of breeding birds of Alberta, Federation of Alberta Naturalists, Edmonton, Alb., 391 pages.

3 Manitoba Avian Research Committee . 2003. The birds of Manitoba, Manitoba Naturalists Society, Winnipeg, Manitoba

4 McConnell, S. D ., R. Van den Driessche, T. D. Hooper, G. L. Roberts, et A. Roberts. 1993. « First occurrence and breeding of Sprague's Pipit, Anthus spragueii, for British Columbia », Can. Field-Nat., 107:222-223.

5 Dale, B., et G. McKeating. 1996. « Finding common ground – the nongame evaluation of the North American Waterfowl Management Plan in Canada », p. 258-265, in Proceedings of 7th International Waterfowl Symposium, J.T. Ratti, éd., Canards Illimités, Memphis.

6 McMaster, D. G., et S. K. Davis. 2001. « An evaluation of Canada's Permanent Cover Program: habitat for grassland birds? » Journal of Field Ornithology, 72:195-210.

7 Dale, B., M. Norton, C. Downes et B. Collins. Sous presse. « Monitoring as a means to focus research and conservation – the Grassland Bird Monitoring example », Proceedings of PIF conference.

8 Dale, B. C., P. A. Martin et P. S. Taylor. 1997. « Effects of hay management on grassland songbirds in Saskatchewan », Wildlife Society Bulletin, 25:616-626.

9 De Smet, K. D., et M. P. Conrad. 1997. « Management and research needs for Baird's Sparrows and other grassland species in Manitoba », p. 83-86, in Provincial Museum of Alberta Natural History Occasional Paper No. 15: proceedings of the second endangered species and prairie conservation workshop (Holroyd, G. L., G. Burns et H. C. Smith, éd.), Provincial Museum of Alberta Natural History, Edmonton, Alberta

10 Davis, S. K., et D. C. Duncan. 1999. « Grassland songbird occurrence in native and crested wheatgrass pastures of southern Saskatchewan », Studies in Avian Biology, 19:211-218.

11 Robbins, M. B., et B. C. Dale. 1999. « Sprague’s Pipit (Anthus spragueii) », in The Birds of North America, no 439 (A. Poole and F. Gill, éd.), The Birds of North America, Inc., Philadelphia, PA.

12 Johnson, D. H, L. D. Igl, J.A. Dechant, M. L. Sondreal,. C. M. Goldade, M. P. Nenneman, et B. R. Euliss. 1998. Effects of management practices on grassland birds: Sprague’s Pipit, Northern Prairie Wildlife Research Center, Jamestown, ND, 10 p.

13 Davis, S. K., D. C. Duncan, et M. A. Skeel. 1999. « Distribution and habitat associations of three endemic grassland songbirds in southern Saskatchewan », Wilson Bulletin, 111:389-396.

14 Madden , E.M., R.K. Murphy, A.J. Hansen et L. Murray. 2000. « Models for guiding management of prairie bird habitat in northwestern North Dakota », American Midland Naturalist, 144:377-392.

15Davis, S. K. 2004. « Detecting area sensitivity of grassland passerines: effects of patch size, patch shape, and vegetation structure on bird abundance and occurrence in southern Saskatchewan », Auk,121:1130-1145.

16Davis, S.K. 2003. Habitat selection and demography of mixed-grass prairie songbirds in a fragmented landscape, thèse de doctorat, University of Regina (Saskatchewan).

17 Dieni, J. S., et S. L. Jones.2003. « Grassland songbird nest site selection patterns in northcentral Montana », Wilson Bulletin, 115:388-396.

18 Sutter, G. C. 1997. « Nest-site selection and nest-entrance orientation in Sprague’s Pipit », Wilson Bulletin, 109:462-469.

19 Harris, R. D. 1933. « Observations on a nest of Sprague’s Pipit (Anthus spragueii) », Canadian Field-Naturalist, 47:91-95.

20 Davis, S. K. 2004. « Natural history and demography of Sprague’s Pipit in south-central Saskatchewan: Unpublished data », Service canadien de la faune, Regina (Sask.).

21Davis, S.K. 2003. « Breeding ecology of mixed-grass prairie songbirds in southern Saskatchewan », Wilson Bulletin, 115:119-130.

22 Davis, S. K . 1994. Cowbird parasitism, predation, and host selection in fragmented grassland of southwestern Manitoba, thèse de maîtrise inédite, University of Manitoba, Winnipeg (Manitoba). 77 pages.

23 Sutter, G. C., D. J. Sawatzky, D. M. Cooper et R. M. Brigham. 1996. « Renesting intervals in Sprague's Pipit, Anthus spragueii », The Canadian Field Naturalist, 110:694-697.

24 Hooper, T. D. 1997. Status of the Sprague's Pipit in British Columbia, B.C. Environment, Wildlife Working Report No. WR-88, Victoria, C.-B., 7 pages.

25 Prescott, D. R. C. 1997. Status of the Sprague's Pipit (Anthus spragueii) in Alberta, Alberta Environmental Protection, Wildlife Management Division, Wildlife Status Report No. 10, Edmonton, Alberta, 14 pages.

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